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Une nouvelle option lycée : découvrez la langue des signes

Découvrir la langue des signes, une option au lycée Sainte-Bernadette de Jeumont

 

Publié le 09/09/2016

Par Cécile Debachy LA VOIX DU NORD

 

 

Signer pour s’ouvrir aux autres, s’intégrer et obtenir une chance professionnelle supplémentaire. Autant de bonnes raisons pour le lycée Sainte-Bernadette d’ouvrir il y a quelques jours une option facultative langue des signes, en accord avec le Rectorat. La seule de la région en lycée professionnel.

« La surdité c’est le seul handicap où finalement, lors d’une rencontre, même le valide se trouve en position d’handicap. » Pour Joël Sansen, conseiller technique du recteur pour l’adaptation et la scolarisation des élèves handicapés, le constat est accablant. Pourtant, dans notre territoire comme dans le reste de la région, il existe peu de cours ou options permettant aux valides et malentendants d’apprendre la langue des signes. À Arras, Tourcoing, Dunkerque... « Des options existent dans les lycées généraux, mais très peu car le vivier de professeurs habilités est faible », reconnaît l’inspecteur.

 

 

Une quinzaine de volontaires

 

Alors, cette création jeumontoise est évidemment perçue comme une belle avancée. « C’est une première dans un lycée professionnel ». Et une bonne nouvelle pour les élèves malentendants et valides du territoire. « En revenant de stage, certains jeunes nous ont expliqué avoir rencontré des personnes malentendantes et ne pas savoir quoi faire », explique Patrick Cognaux, directeur de l’institution Sainte-Bernadette, à l’initiative de cette création. En lien avec Signons ensemble (lire ci-dessous), le chef d’établissement a créé cette option facultative pour les élèves de ses trois filières professionnelles : gestion administration, commerce, soins et services à la personne. « Il y a un intérêt personnel et dans chacune de ces filières. Ça peut changer le regard sur le handicap, permettre d’aller vers les autres et être un plus sur le CV de ces jeunes qui seront par exemple amenés à travailler en accueil, auprès de personnes âgées, etc. », poursuit Patrick Cognaux.

Un intérêt professionnel reconnu par l’Académie lilloise qui a validé le projet. « Cela peut aider à apprendre cette langue, pour permettre aux malentendants déjà de communiquer avec les autres élèves d’un établissement. Et ça peut évidemment être utile dans le milieu professionnel », croit Joël Sansen. Cette année, une quinzaine de jeunes volontaires se sont incrits. Un démarrage encourageant pour le directeur. Chaque semaine, ces élèves passeront deux heures sous un casque, sans connexion auditive avec le reste de l’établissement pour apprendre à communiquer et voir le monde autrement.

 

 

 

« C’est une forme de reconnaissance »

 

Confronter le monde des valides à celui des sourds ou malentendants : une expérience dont sont coutumières Estelle et Aurore, à la tête de l’association Signons ensemble, créée en 2009 par Estelle Jaffrezic, en Thiérache.

Si Aurore est sourde, Estelle, elle, a été sensibilisée à ce handicap plus jeune, par son entourage qui souffrait de ces maux. « J’ai eu envie de faire connaître le monde des sourds et de les sortir de leur isolement », explique la professeure. En créant des ateliers, des cafés signes, comme à Maubeuge il y a quelques années (depuis à l’arrêt) ou en intervenant dans les écoles, comme ce fut le cas l’an dernier à Maubeuge, où les deux femmes ont fait la connaissance de Patrick Cognaux, directeur de Sainte-Bernadette, emballé par leur projet. Mais ouvrir une véritable option au sein d’un établissement, Estelle l’admet, « c’est très différent ». « On va toucher les jeunes dans leurs études, ça va devenir officiel, c’est une forme de reconnaissance », détaille celle qui intervient déjà dans des établissements généraux de Saint-Quentin depuis cinq ans et à Hazebrouck. « C’est important que la personne sourde soit reconnue, ainsi que sa langue, sa culture, son histoire. C’est une langue à part entière qui permet de communiquer autrement. »

Une communication avec le corps, que les Jeumontois ont découverte cette semaine à l’aide des deux femmes. « Les cours se font en totale immersion », précise Estelle, puisqu’Aurore travaille uniquement grâce au visuel. À Jeumont, la petite association espère susciter l’intérêt. « C’est essentiel d’autant qu’en Sambre-Avesnois, la communauté est particulièrement importante », avance la jeune femme.

Si aucun chiffre n’existe, Estelle croise régulièrement des parents isolés, contraints de déscolariser leurs enfants, faute de structure, d’accompagnement. Preuve que le chemin semble encore très long avant une totale intégration...